Le système de santé s’essouffle
Le Maroc continue de souffrir d'une pénurie de médecins. Le royaume a besoin de 47 000 médecins et le déficit pourrait atteindre 53 000 d'ici 2035, estimait la Cour des comptes en 2023. Les causes ? Selon la Cour des comptes, un tiers des diplômés en médecine partent chaque année à l'étranger, alors que le pays est confronté à un déficit de 47 000 praticiens, rapporte Le monde. Le sociologue Hicham Jamid, auteur d'une thèse sur les migrants hautement qualifiés, parle de « fuite des cerveaux ». Selon la fondation des professeurs de médecine libérale, ils sont estimés « entre 600 et 700 », soit un tiers des praticiens formés annuellement au Maroc. Près de 1 200 médecins marocains diplômés dans le royaume étaient inscrits à l'ordre, selon les chiffres publiés par le conseil national de l'ordre des médecins en 2017. Et, le gouvernement français envisage de recruter des praticiens à l'étranger dont le Maroc. Une mission que le président Emmanuel Macron a confiée au Premier ministre Gabriel Attal. Ces derniers devront à leur tour nommer un émissaire chargé de rechercher à l'étranger des médecins pour combler « le vide abyssal » des services d'urgence.
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Les conditions de travail des médecins de santé publique au Maroc sont remises en cause. La rémunération « ne favorise pas la motivation au sein des hôpitaux publics », affirmait la commission spéciale sur le modèle de développement qui avait souligné en 2021 la nécessité d'une meilleure promotion des métiers de santé. « Un jeune résident contractuel dans un centre hospitalier universitaire touche environ 800 euros par mois. En fin de carrière, après trente ou trente-cinq ans d'expérience, c'est environ 2 500 euros. En France ou en Allemagne, il toucherait trois ou quatre fois plus », confie Loubna El Mansori, qui travaille à Tanger. Autre cause : une législation qui interdit la mobilité dans le royaume. “Aujourd'hui, un médecin de Rabat n'a pas le droit d'exercer à Casablanca, même un jour par semaine, à moins de fermer son cabinet”, explique Jaafar Heikel, infectiologue et économiste de la santé. Il a ajouté : « C'est comme si un médecin à Paris ne pouvait pas exercer à Lille, ça n'a pas de sens. Si l'on facilitait la mobilité des médecins au Maroc, on pourrait combler rapidement les déficits dans certaines spécialités, en fonction des besoins de chaque territoire et en coordination avec les autorités de tutelle. »
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Pendant ce temps, la nouvelle réforme des études de médecine, la durée de la formation médicale qui passe de 7 ans à 6 ans, va mal. En témoigne le boycott, depuis près de deux mois, des cours, stages et examens du premier semestre par la majorité des quelque 24 000 étudiants inscrits dans les facultés publiques de médecine, précise la commission nationale des étudiants en médecine. « Une réforme mal préparée qui pose plus de questions qu'elle n'apporte de réponses », assure Imad Hamidine, président du bureau des étudiants en médecine de Tanger. Il déplore le manque de visibilité autour du sort réservé au contenu de la septième année de formation, jusqu'alors consacrée aux stages hospitaliers pour les internes à temps plein.