
La première carte biogéographique des fourmis révèle neuf domaines mondiaux
La classification biogéographique phylogénétique globale pour 267 genres de fourmis montre 7 domaines et 21 régions. Crédit : Nature Communications (2024). DOI : 10.1038/s41467-024-49918-2
La répartition des espèces à travers le monde n’est pas un processus aléatoire mais le résultat de plusieurs mécanismes évolutifs ainsi que de limitations environnementales passées et actuelles. En conséquence, depuis le milieu du XIXe siècle, les biologistes ont identifié plusieurs régions principales, appelées domaines biogéographiques, qui représentent ces grands ensembles d’espèces à travers le monde. Ces domaines biogéographiques représentent l’une des descriptions les plus fondamentales de la biodiversité sur Terre et sont couramment utilisés dans divers domaines de la biologie.
Pendant près de 150 ans, la caractérisation de ces unités biogéographiques a cependant résulté exclusivement de l’étude des groupes de vertébrés (oiseaux, mammifères, etc.) et de groupes végétaux. Ces derniers ne représentent cependant qu’une minorité des espèces présentes sur Terre. En revanche, des groupes hyperdivers comme les insectes ont été laissés de côté de ces efforts qui offrent pourtant un outil fondamental pour la planification de la conservation et la compréhension de la répartition de la biodiversité.
Récemment, des écologistes de l’Université de Hong Kong (HKU) et leurs collaborateurs au Japon ont cartographié les régions biogéographiques mondiales d’un groupe majeur d’insectes, les fourmis, fournissant ainsi le premier effort et un ensemble d’approches novatrices pour inclure ces organismes. Ce travail, publié dans Nature Communicationsoffre la meilleure fenêtre à ce jour pour comprendre la répartition des insectes et est importante pour la conservation mondiale.
Les insectes, « ces petites choses qui dirigent le monde », représentent plus de 55 % de toutes les espèces décrites. Cependant, le manque de connaissances sur leur répartition empêche les scientifiques de cartographier leurs régions biogéographiques.
« Une première étape pour protéger les espèces, et donc la biodiversité, est de comprendre où elles se trouvent », explique le professeur Benoit Guénard, auteur principal de l’étude et directeur du laboratoire de biodiversité et de biogéographie des insectes à l’École des sciences biologiques de HKU (SBS).
Pour relever ce défi, le professeur Guénard dirige depuis plus d’une décennie une équipe internationale chargée de rassembler les données de répartition de près de 16 000 espèces de fourmis. Les fourmis comptent parmi les insectes les plus répandus et les plus dominants sur le plan écologique, pesant jusqu’à deux fois la masse combinée des oiseaux et des mammifères sauvages, comme l’a montré une étude précédente de l’équipe du professeur Guénard.
Pour un groupe d’insectes, elles sont relativement bien documentées. Le travail acharné de l’équipe du professeur Guénard, qui a compilé des données issues de plus de 300 ans de recherche sur les fourmis, a permis d’utiliser des techniques avancées, notamment la bioinformatique et l’apprentissage automatique, pour prédire et analyser leur répartition. Au final, ils ont pu produire la première carte biogéographique des fourmis.
Cette carte montre la division du territoire mondial des fourmis en neuf grands domaines biogéographiques.
« Il est intéressant de noter que lorsque j’ai comparé cette carte avec celles des vertébrés et des plantes, j’ai constaté de nombreuses similitudes », explique le premier auteur, Runxi Wang, doctorant à l’École des sciences biologiques, « les fourmis et les plantes partageant plusieurs régions que l’on ne trouve pas chez les vertébrés. »
L’analyse plus poussée confirme les observations des auteurs : les régions biogéographiques sont très similaires parmi les différents taxons, mais les plantes sont plus semblables aux fourmis qu’à tout autre groupe de vertébrés.
« Ce n’est pas très surprenant, car nous savons que les fourmis et les plantes entretiennent des relations écologiques et évolutives très étroites. Par exemple, les fourmis aident des dizaines de milliers de plantes à disperser leurs graines et protègent un nombre encore plus important de plantes des herbivores. Elles co-évoluent depuis des millions d’années, explique le professeur Guénard. Mais c’est l’une des premières preuves de conséquences biogéographiques aussi importantes. »
Ce résultat indique que de nombreuses similitudes entre les animaux et les plantes peuvent ne pas être prises en compte par les vertébrés.
« Les fourmis ne peuvent pas à elles seules représenter l’hyperdiversité de tous les insectes, mais leurs similitudes avec les plantes ne constituent probablement pas une exception », déclare Wang. « Nous devons certainement redoubler d’efforts pour inclure davantage de groupes d’insectes à l’avenir afin de dresser un tableau global de la biodiversité. »
Plus d’informations :
Runxi Wang et al., Les régions biogéographiques mondiales des fourmis ont des relations complexes avec celles des plantes et des tétrapodes, Nature Communications (2024). DOI : 10.1038/s41467-024-49918-2
Fourni par l’Université de Hong Kong
Citation:La première carte biogéographique des fourmis révèle neuf royaumes mondiaux (2024, 14 août) récupéré le 14 août 2024 à partir de
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